[Blog] Colonie de Lasius flavus

[jeanfransouague]

Pour mon quatrième suivi, je m'attaque à une espèce réputée comme plus compliquée à élever que mes autres espèces, la Lasius jaune (L. flavus ? L. myops ? Pour m'aider ou autre, voici le lien du Q/R : https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... 53&t=25719). En effet contrairement aux autres Lasius, cette espèce est très timide (dans la nature elles exploitent le miellat de pucerons, mais celui des pucerons de racines, elles ne sortent donc presque jamais à la surface de la Terre), ne sortent pas beaucoup dans l'ADC et on constate souvent des morts prématurées inexpliquées de la colonie... De plus cette espèce est réputée monogyne mais lors de l'essaimage que j'ai rencontré, j'ai capturé 3 gynes, dont 2 que j'ai données qui fondent en pléométrose, voire en réelle polygynie étant donné que les premières ouvrières sont apparues et que tout se passe toujours bien.
Toutes les photos de ce blog ont été prises à l'aide d'un smartphone et d'une loupe.

29 juillet 2017
Il y a un essaimage du soir de Lasius jaunes en banlieue Lilloise, on ne voit que des gynes et aucune ouvrière. Je capture quelques gynes fécondes (sans leurs ailes) et les place en tube à essai avec réserve d'eau (comme d'habitude).

3 août 2017
Les gynes ont pondu, je ne les observe que très rarement.

26 août 2017
Le couvain évolue assez lentement, je donne deux des gynes à un ami, il ne m'en reste donc qu'une seule.

Gyne Lasius jaune avec quelques larves et oeufs.

13 septembre 2017
Pour booster un peu la reine et être serein, je lui donne un mélange de miel + gelée royale bio sur un morceau de papier aluminium directement dans son tube. Elle est assez craintive mais au final elle consomme le liquide. Il y a enfin quelques cocons.

Gyne Lasius jaune avec le couvain et son repas.

6 octobre 2017
C'est après plus de 2 mois que les premières ouvrières naissent enfin ! Elles sont au nombre de 3, minuscules et magnifiques. Elles deviennent de plus en plus jaunes/oranges le lendemain (durcissement de l'exosquelette).
J'ai fait un petit trou dans le bouchon de liège qui fermait le tube en guise d'entrée au nid, et j'ai placé le tube dans une boîte en plastique (faisant partie d'un mini-meuble à tiroirs dans lequel je range toutes mes colonies) décorée faisant office d'ADC. L'anti-évasion que j'utilise est l'huile de paraffine. Il y a dans la boîte un morceau de coton imbibé de pseudo-miellat (eau, miel + gelée royale, sirop d'érable), un petit morceau de sucre en guise de réserve permanente de nourriture et un petit tube à essai reproduisant une réserve d'eau. Je n'ai pour l'instant vu aucune ouvrière sortir du tube, il va falloir s'y habituer je pense...

Petite colonie de Lasius jaunes au complet (j'adore cette loupe, on peut carrément compter le nombre de segments des antennes de la gyne).

Grâce au reflet on peut ici bien distinguer une ouvrière Lasius jaune. La gyne est à côté.

Installation en ADC de la fondation de Lasius jaunes.

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13 octobre 2017
Une quatrième ouvrière est née, j'ai donné une minuscule goutte de sirop d'érable à la colonie mais le problème est qu'à ce stade elles ne sortent jamais du nid. Pour m'assurer qu'elles se nourrissent bien, j'ai déposé devant l'entrée du tube un moucheron congelé depuis trois jours. Je m'aperçois tard le soir qu'une ouvrière venait de sortir pour transporter le moucheron, le timing était parfait.

Ouvrière Lasius jaune transportant un moucheron dans ses mandibules.

Jeune colonie de Lasius jaunes dévorant un moucheron.

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13 novembre 2017
Il y a désormais sept ouvrières, et la colonie s'apprête à rentrer en diapause après avoir fait de bonnes réserves (moucherons, larves de ténébrions, pseudo-miellat, etc.).

Jeune colonie de Lasius jaunes, avec une nouvelle née (toute blanche) sous la reine.

En effet l'activité de mes colonies a nettement baissé et toutes les espèces que je maintiens ont une diapause endogène hétérodynamique, j'ai donc procédé à une baisse progressive de la température sur une semaine (pour passer de 18 à 9°C), d'abord en déplaçant tout près d'une fenêtre (17°C), puis en ouvrant cette fenêtre (jusqu'à 15°C le jour et 12 la nuit, et ça en permanence dans toute ma chambre), pour finalement atteindre 9°C avec les colonies directement exposées au froid et au vent en calant les boîtes à fourmis à la limite de l'extérieur pendant une nuit (je ne suis pas non plus masochiste, c'est ma chambre mais je n'avais pas d'autre solution).
Suite à ça j'ai mis les colonies dans le bac à légumes de mon frigo, qui en raison de son âge ne descend pas en dessous de 5°C donc c'est parfait pour mes fourmis qui viennent toutes du Nord de la France.
Pour plus de confort et de sécurité j'ai tout de même enveloppé le tout de tissus (isolation en haut et en bas pour éviter la conduction) afin que les fourmis soient entre 6 et 8°C. Un jour plus tard toutes les colonies sont certes quasi-immobiles mais bien en vie (les antennes bougent).
Donc plus de fourmis pendant 3 mois, espérons qu'il n'y ait pas trop de pertes.

[jeanfransouague]

16 décembre 2017
Je vérifie les réserves d'eau régulièrement et les change quand c'est nécessaire, la température quant à elle oscille entre 5 et 10 °C. Lorsqu'il fait un peu plus froid dehors et donc dans la chambre, ça peut même atteindre les 4 voire 3,8 °C ! Les fourmis survivent, ne bougent que très peu et ont accès au cas où à du miel en permanence dans l'ADC.

16 janvier 2018
Il commence à y avoir beaucoup de condensation dans certains tubes, ce qui réveille un peu quelques fourmis. Tout se passe normalement à part ça.

22 janvier 2018
Certaines colonies sont clairement réveillées, je prévois donc de les sortir du frigo le 26 janvier, avec une remontée progressive de la température, fenêtre ouverte comme avant.

30 janvier 2018
Les fourmis sont dehors, la chambre est à 12 °C environ, et je repousse chaque jour un peu plus la fenêtre.
J'ai eu l'opportunité d'observer cette colonie à la loupe binoculaire et j'en ai donc profité pour identifier clairement l'espèce (et ne pas juste la nommer "Lasius jaune"). Pour ça, j'ai utilisé la clef de Claude Lebas (sur Antarea) et ce sont soit des Lasius flavus soit des Lasius myops, mais il m'est impossible de savoir laquelle des deux espèces c'est pour le moment étant donné qu'il faudrait que je compte le nombre d'omatidies des yeux des ouvrières (s'il y en a plus ou moins de 35), d'où le cf..

Ouvrière vue de très près (mauvaise qualité d'image ici...).

18 février 2018
Bien qu'il n'y ait eu aucune perte pendant la diapause, la reine ne reprend la ponte que très doucement, le couvain est tout petit. Pour booster le couvain je donne à la colonie un morceau de tube digestif (ou canal sexuel ?) de fœtus de canard (provenant d'un oeuf de cane fécondé bouilli, plat asiatique). Les ouvrières se ruent dessus à plusieurs mais sont timides pour les photos...

Ouvrières Lasius flavus s'attaquant à un morceau de de fœtus de canard.

[jeanfransouague]

12 mars 2018
La colonie se porte bien, il y a quelques larves. Pour varier la nourriture je leur donne des fruits de temps en temps, et comme ça faisait longtemps, un cloporte :

Ouvrières Lasius flavus s'attaquant à un cloporte.

24 mars 2018
Des débuts de cocons se forment, et j'abandonne l'huile de paraffine pour la graisse mécanique qui a une meilleure autonomie.

8 avril 2018
Lors d"une observation je m'aperçois qu'une ouvrière est inerte, piégée dans du miel !
Cela m'était déjà arrivé avec une ouvrière Lasius niger, j'applique alors le même protocole, c'est-à-dire que je dépose cette ouvrière sur du papier absorbant et que je fais passer des gouttes d'eau dessus : l'eau est absorbée et nettoie le miel en passant. Après ça je fais sécher l'ouvrière, elle bouge déjà quelques pattes et ses antennes.
Cependant il lui reste des pattes fortement collées entre elles qu'il m'est impossible de décoller sans faire de dégâts.
Je dépose alors l'ouvrière devant l'entrée de son nid, peut-être qu'elle se fera nettoyer par ses sœurs.
Environ une heure plus tard l'ouvrière n'est plus là et je n'ai malheureusement pas pu compter le nombre d'individus de la colonie avant l'incident, je ne sais donc pas si elle s'est faite récupérer puis nettoyer par les autres ou bien enterrer.

Ouvrière Lasius flavus dans une goutte de miel sur du papier absorbant.

Ouvrière Lasius flavus étourdie par sa noyade, laissée devant son nid.

Edit : J'ai modifié le Lasius "cf." flavus en Lasius "sp.aff." flavus, car "cf." n'avait pas lieu d'être utilisé ici, c'était une erreur de ma part (cf. les abréviations de taxonomie).

Re-edit : Avec le temps j'observe un léger polymorphisme chez les ouvrières et les plus grandes ont la tête plus sombre que les autres, c'est certain, ce sont donc avec certitude des Lasius flavus, pas de cf. ni de sp.aff. cette fois !

[jeanfransouague]

17 août 2018
Il n'y a pas grand chose à dire sur cette colonie. Après un an il n'y a que 20 ouvrières (le peu d'ouvrières constituant la première génération est morte, ce qui est normal). La colonie n'est pas très active, je ne vois jamais d'ouvrières dans l'aire de chasse, elles ne ramènent jamais les insectes morts que je leur donne dans le nid, donc je ne l'observe que très peu.
Il n'y a jamais plus de 4-5 œufs/larves/cocons dans le couvain, d'ailleurs il n'y a plus de couvain depuis quelques jours.
La colonie est en déclin.
Elles sont pourtant toujours au calme étant donné que je les observe très rarement, elles ont toujours de la nourriture à disposition dans l'aire de chasse... Peut-être que la gyne est peu féconde ? Peut-être que la chaleur les a perturbées (30°C dans les installations avec la canicule par moments, pas moyen de refroidir plus) ?

Colonie de Lasius flavus au complet.